Message Jeu Mar 26, 2009 8:07 am

Pièce de théâtre (DIX - Anatomie d'un désordre)

Exceptionnellement, une critique d'une pièce de théâtre qui vaut largement le détour...


_Mardi 24 mars 2009 :
.DIX – Anatomie d’un désordre (de Vincent Champoux) (mise en scène : Stéphan Allard) (Studio de création Marc-Doré du Théâtre Périscope) (20h00)


Un homme, Benoît Langevin, arrive seul. Il vient présenter une conférence sur le système Dewey, qui sert à classer les différentes catégories de livres dans les bibliothèques. Mais le bonhomme est nerveux, il bafouille et est mal à l’aise. Et s’il n’était pas vraiment Benoît Langevin ?

On connaît Vincent Champoux depuis quelques années dans le milieu culturel à Québec. Abonné au théâtre d’été (il excelle dans le rôle de Lucien Cheval dans Le dîner de cons, encore présenté l’été prochain au Théâtre Petit-Champlain), c’est aussi et surtout un vrai acteur dramatique, qui a joué, entre autres, dans Sans sang et Variations énigmatiques. C’est ce Champoux-là qui a écrit et joué DIX – Anatomie d’un désordre. Et cette pièce, à ranger du côté de l’expérience théâtrale, risque fort d’être gravée dans les mémoires de ceux qui l’auront vue. Dont moi. Car le personnage de Melville Pagé est le plus grand imposteur du Québec. Il change d’identité (consciemment, ce n’est donc pas de la schizophrénie) comme de chemise (même plus que de chemise d’ailleurs), mais c’est pour fuir un vide intérieur, c’est pour fuit qui il est vraiment. Ce personnage, fort complexe à la psychologie profonde, mériterait d’être couché sur papier...

Langevin/Pagé, au début de la pièce, échappe ses diapositives. Champoux doit donc « improvisé » avec l’ordre (qui n’est au fond qu’un prétexte) que choisit le hasard chaque fois. Sa plus grande force est de s’adapter aux imprévus et de faire naturellement les liens entre chaque code Dewey, avec une aisance bluffante. La mise en scène de Stéphan Allard est inventive, surprenante, énergique (soulignons l’apport considérable des éclairages de Marie-Renée Bourget-Harvey). Le spectateur (il peut en avoir une cinquantaine maximum par soir) est happé, hypnotisé par Champoux qui se révèle dans le cas présent aussi bon comédien qu’auteur.

Je ne pourrais en dire beaucoup plus sur cette pièce expérimentale mais qui m’a marquée profondément. Car, je l’avoue, l’imposture est très attrayante. Vivre mille vies sans cesse, sans remords, est un quotidien peu banal et toujours énergique. C’est pourquoi le personnage de Melville Pagé m’accompagnera longtemps, souvent, et sera sûrement une source infinie d’inspiration pour tout, la vie et l’art.
Dix – Anatomie d’un désordre est un spectacle marquant, marqué, inoubliable, un petit chef-d’œuvre d’inventivité et d’originalité, une preuve évidente de la bonne santé du théâtre à Québec et de l’importance de Vincent Champoux dans ce paysage.




http://www.theatreperiscope.qc.ca/progr ... k_saison=7
http://web.mac.com/vchampoux/iWeb/dix/Imposteur.html
http://www.voir.ca/publishing/article.a ... icle=63450