Message Dim Oct 11, 2015 8:17 am

Comprendre le Blues : les notes

VI - Valeur relative des notes en Blues

On a déjà mentioné que toutes les notes de la gamme n'avaient pas une importance égale. Revoyons ces notes avec des lunettes Blues.

Tonique
Appelée en anglais "root", celle qui donne le nom à la tonalité,  donc première note de toute gamme, elle constitue la base, la note de référence, le point d'ancrage, la note de repos, celle qui résout les tensions.

Seconde
On parlera plutôt de la neuvième, soit la seconde par delà l'octave. Mais cette note n'appartient pas à la gamme pentatonique mineure, ni à la gamme de Blues. Appartenant à la pentatonique majeure, elle est plus jazz (pensez aux accords de 9è et 6/9 en jazz). Elle viendra donc occasionnellement colorer un solo de Blues où elle pourra évidemment servir de note de passage («passing tone») dans une montée ou descente chromatique. Elle ne paraît pas davantage jouer le rôle d’ambiguïté qu'on lui prête dans un accord suspendu "sus2" où elle remplacerait la tierce.

Tierce
Dans la gamme de Blues, il s'agit de la tierce mineure («b3»), une note importante, puisque c'est elle qui fait la différence entre l'accompagnement qui repose sur des accords majeurs et le solo qui se joue en mode mineur ! Il ne faut pas pour autant négliger la tierce majeure qui pourra en particulier terminer un solo pour ainsi recréer le lien avec l'accompagnement.

Quarte
Elle ne paraît pas davantage jouer le rôle d'ambiguité qu'on lui prête dans un accord suspendu "sus4" où elle remplacerait la tierce. Par contre, elle présente en Blues un intérêt... qu'on précisera plus loin.

Quinte
Ah ! Que vous dire ! La quinte mineure (b5), LA BLUE NOTE, la seule note ajoutée à la gamme mineure pentatonique. MAIS, et ce MAIS est plus que majeur, «b5» en elle-même est tellement dissonante (cf. Diabolus in Musica : la note diabolique qui corrompt le point milieu de la gamme !) qu'on ne peut y demeurer, on ne peut y arrêter sa phrase : «b5» est OBLIGATOIREMENT une note de passage («passing tone»).  Elle va donc, selon qu'on monte ou descend, précéder ou suivre la quinte majeure (5).

L'importance cette "Blue note" ne doit en aucune façon vous amener à sous-estimer le pouvoir la quinte majeure, celle qui, comme la tonique, est omniprésente, incontournable, celle qui au final sera génératrice de tension, puisque «b5» restera toujours une note de passage.

NB Thelonius Monk, un jazzman réputé, utilisait b5 comme note... à part entière... ;-)

Sixte
Comme la seconde, cette note n'appartient pas à la gamme pentatonique mineure, ni à la gamme de Blues. Appartenant à la pentatonique majeure, elle est donc plus jazz (cf. accord de 6è et 6/9). Elle viendra donc occasionnellement colorer un solo de Blues.

Septième
Dans la gamme de Blues, il s'agit de la septième mineure («b7»). Comme on l'a mentionné, elle orne fréquemment les accords d'accompagnement de Blues. Il s'agit donc d'une note importante, La septième majeure est pratiquement ignorée.

Quelles notes privilégier ?

Pour la construction de solo, la tonique de l'accord (donc de sa gamme), note stable, s'avère excellente tant pour l'amorce que pour la conclusion.

Mike Christiansen suggère pour sa part de débuter chaque mesure avec l'une des notes composant l'accord : cela confère une direction harmonique au solo en plus de le relier à l'accord sur lequel il est joué. Il faudrait toutefois éviter de conclure sur la 7è.

Cependant, rien ne vous empêche d'inclure une seconde (ou neuvième) ou une sixte, en particulier comme note transitoire («passing tone») dans une suite chromatique : tous les coups sont permis! Rappelez-vous : particulièrement en Blues, le «groove» importe davantage que les règles !

Enfin, un mot sur le grand absent de la liste, le silence : il est suggéré d'en laisser aux mesures 3, 7 11 et 12, mais il n'y a évidemment pas de règle fixe : quand vous parlez, vos phrases ne sont pas toujours construites de la même façon, n'est-ce pas ? Et si les mesures 11 & 12 sont occupées par un «turn-around», il vous reste peu d'endroits où laisser vos auditeurs respirer... Ce qui m'amène à un indice de qualité d'un solo de Blues : pourriez-vous le «chanter» ?

On nous a recommandé d'utiliser les notes avec parcimonie et d'en privilégier certaines : mais alors, ces phrases, avec peu de mots, comment peuvent-elles ne pas devenir redondantes, monotones ? Bon point ! Et j'ajouterais, peut-on en modifier la valeur relative, rendre une note de moindre importance plus «payante»?
Pour le temps qu'il me reste ? PASSION MUSIQUE !!!